Friday, November 7, 2008

Sarkozy veut convaincre l’Europe, avant Washington


Économie 7 nov. 6h51


Le chef de l’Etat donne cent jours aux pays du G20 pour élaborer des propositions afin de réformer les marchés.


GRÉGOIRE BISEAU


Il ne sera pas dit que Nicolas Sarkozy se sera couché devant l’ampleur de la tâche. Déterminé à faire accoucher de cette crise financière au moins quelques mesures labelisables sous le titre de «réforme du système financier mondial», il a donné à ses partenaires du G20 «cent jours», à compter du 15 novembre, pour aboutir à «des propositions concrètes et opérationnelles». Soit le 23 février, dernier délai, pour rendre sa copie. Un mois seulement après la prise de fonction de Barack Obama. Alors que l’administration américaine avait déclaré en début de semaine qu’il ne fallait justement pas «s’attendre à des mesures concrètes» après la réunion de Washington du 20 novembre, Nicolas Sarkozy semble déterminé à profiter de cette période de transition entre les équipes de Bush et d’Obama pour imposer sinon ses vues au moins son rythme.

Accueil tiède. Aujourd’hui, et juste avant un G20 des ministres des Finances qui se tiendra ce week-end à São Paulo au Brésil, le «Sarko Tour» s’arrête à Bruxelles. Le président français réunit les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne pour tenter d’afficher une position commune sur son projet de «réformes du système financier mondial». En début de semaine, un premier projet de conclusions avait été soumis aux ministres des Finances de l’Union. L’accueil fut tiède. Les Anglais l’ont jugé «trop détaillé» et demandé de revenir à des principes plus généraux. Et les Allemands étaient très agacés par le projet français de vouloir créer un «gouvernement économique de la zone euro». Et sur le fond ? «Il y a un vrai consensus avec la majorité des pays européens», assure une source proche de la présidence française. Mais comme souvent dans ces exercices, les gros problèmes sont dans les petits détails.

Si Français et Allemands sont, par exemple, plutôt en phase sur le diagnostic général de la crise, la question de la régulation des hedge funds continue d’empoisonner les deux pays. Berlin tient, depuis longtemps, à une régulation stricte de ces fonds d’investissement de très court terme, qui fonctionnent le plus souvent par recours à l’endettement. «On a une approche plus libérale que les Allemands sur la question», reconnaît un fonctionnaire français. Les Allemands, eux, seraient favorables à des règles prudentielles strictes qui, de fait, limiteraient l’activité de ces fonds. La France est bien plus prudente. Et pour se justifier, elle laisse entendre que les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ne voudront jamais d’une régulation aussi générale.

Nuance. Autre sujet de désaccord, avec la Grande Bretagne cette fois : l’avenir du FMI. Même si la quasi-totalité des Européens sont d’accords pour donner plus de pouvoir macroéconomique au FMI et réformer son mode de gouvernance pour mieux représenter les nouveaux pays émergents, les Anglais (contrairement aux Français) ne voient pas d’un très bon œil l’avènement d’une institution internationale capable, demain, de jouer le rôle de «supergendarme des marchés financiers». Concernant le rôle du FMI, le texte, dans sa nouvelle version, a d’ailleurs remplacé l’expression de «surveillance financière» par celui «de stabilité financière». Petite nuance. Mais grosses conséquences.

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